Préfaces et préfaciers du livre pour enfants en tamazight. Formes et médiation

Ouiza TIKOBAINI (Auteur)
Mohand Akli HADIBI (Auteur)
19 – 30
Varia
N° 107 — Vol. 29 — 30/06/2025

L’ouvrage rédigé en tamazight[3] à destination des enfants (de la catégorie d’âge allant de 3 à 12 ans) est nouveau dans la scène culturelle. Il participe, tout comme le roman, la nouvelle et le théâtre, à la dynamique novatrice de la littérature tamazight, et plus généralement amazighe. Il instaure, entre autres, de nouvelles dimensions dans la transmission et la réception des textes produits et proposés aux enfants. Dans le mouvement d’installation de ce type de livres sur le plan culturel et économique, des discours en relation avec les dimensions sémiologique, iconographique
et scripturaire l’accompagnent. Ceux-ci ont l’ambition de justifier aussi bien son apparition que le type du public à qui il est destiné. Sans exclusivité, ces discours sont généralement donnés avant les textes qui sont censés être leur objet. En effet, c’est vers la dernière décennie du siècle dernier, avec les préfaces d’Allahoum (1995), de Chemini (2008) et de Nait Zerrad (1998), que la pratique de la préface a commencé. Progressivement, cette pratique se généralisait à partir des années 2000 ; on en dénombre celles de Bilek (2009), de Nait Zerrad (2002 ; 2009 ; 2016), de Chemini (2009), de Lucienne (2011), de Touati (2012), de Nekkar (2016), entre autres. Il y a lieu de noter que les premières préfaces l’ont été dans les éditions étrangères (Nait Zerrad, Chemini).

En s’appuyant sur un corpus de vingt-quatre livres, la présente étude tente de mettre en lumière la nature du discours de la préface sur le plan de ses formes et de ses producteurs. Le questionnement sous-jacent du regard proposé ici, et qui fonde les objectifs de cette étude, est d’alimenter le débat sur l’émergence de la littérature écrite pour enfants en tamazight, en cherchant à savoir qui a produit ces discours et comment ces derniers sont-ils proposés aux récepteurs.

Le premier objectif de cette recherche, est de savoir qui a écrit ce discours et comment ce dernier se présente-t-il aux récepteurs. Autrement dit, quid des profils et des statuts des agents ayant écrit ces préfaces et les formes de ces dernières et comment ces discours présentateurs sont livrés à la réception. Le second objectif, pris dès à présent comme perspective à engager, est de fournir les données nécessaires à l’étude du discours de la préface des livres destinés aux enfants, aussi bien dans ses contenus qu’en comparaison avec les autres préfaces, celles du roman, analysées par Sadi (2022) et/ou de la nouvelle.

Deux parties établissent la structure de cette étude. Chacune d’elles correspond à un niveau précis d’analyse. En présentant un panorama des textes constituant le discours de la préface de la littérature pour enfants, la première partie se veut un moment durant lequel l’observation est focalisée sur les formes que revêtent les discours qui accompagnent les textes pour enfants. L’orientation globale de ce niveau est, donc, de nature morphologique ; son thème principal est de noter leur existence
et leurs types, en tant que textes parlant d’un autre texte. Les notations concernent toute indication pouvant renseigner sur la forme de ces discours : langue d’expression, longueur, caractères d’écriture, etc.

La seconde partie est relative au niveau qui intéresse les rédacteurs de ces textes présentateurs. Il y est question de proposer un tableau du personnel qui accompagne l’émergence de la littérature pour enfants. L’ambition principale est de fournir des éléments composant le(s) profil(s) des agents qui présentent cette catégorie de textes, car l’objectif est de connaitre ce que développent les préfaces et leurs enjeux de nature pragmatique (en relation avec les stratégies d’énonciation : qui parle dans la préface ? Comment ? Pour qui ? Pourquoi ?). Ces questionnements seront mieux cernés si l’analyste dispose d’informations concrètes sur les pratiques et les formes des préfaces. De même, la perspective comparative, envisagée comme continuité et approfondissement de la présente étude, sera pratiquée dans de meilleures conditions s’il dispose également de caractéristiques morphologiques sur la pratique de la préface et de connaissances sociologiques, relatives aux types et statuts des préfaciers qui aideraient à expliquer le fonctionnement de la préface à la fois comme discours et comme médiation.

La préface comme discours et comme médiation

La focalisation, dans cette étude, sur la seule préface, à l’exclusion des autres types de discours présentateurs de textes, se justifie par la volonté de mettre l’attention complète sur ce type de discours. De fonction multiple, le discours de la préface est le plus complexe. Ce dernier accompagne le texte qu’il présente, il le justifie, il l’encense même, si besoin est, en le situant parmi tant d’autres. Comme la littérature « n’est pas une activité immanente et séparée du monde, mais bien plutôt négociée entre des acteurs, des institutions et le monde, des représentations du social et des modes de représentation, des configurations discursives et des configurations socio-historiques » (Koffeman & Sécardin, 2020), la préface est aussi médiation. Par sa forme, la posture de son rédacteur et son discours, elle est à la fois négociation et position (Viala, 1988). Par ailleurs, même si le texte provient généralement de l’oralité, le « genre du conte écrit » est nouveau dans la configuration poétique contemporaine dans la littérature tamazight; il se démarque des textes de l’oralité, par son écriture déjà, mais aussi par sa signifiance dans la mesure où l’accès au sens n’y est plus tributaire de la performance orale. La réception des textes de ce nouveau genre se fait désormais dans l’acte de la lecture et dans l’interprétation relationnelle entre texte et l’encadrement iconographique. Du fait qu’elle est porteuse de nouvelles informations, la préface est aussi le texte qui d’une manière ou d’une autre, participe grandement à la théorisation du genre, ici le conte écrit destiné à l’enfant (Nières-Chevrel, 2009, p. 17).

Aussi, l’acte de préfacer un texte, tout comme celui de solliciter un préfacier, est lourd de sens. C’est un acte indicateur d’une sorte de coalition pour un projet (littéraire). L’auteur voit chez
le préfacier un pouvoir symbolique qui soutiendrait l’avenir du texte préfacé. Plusieurs facteurs sont à la base du choix d’un préfacier dont la relation de l’auteur du texte avec l’auteur de
la préface, le statut du préfacier et sa position dans l’institution littéraire et plus largement dans la vie culturelle et le prestige, idéologique entre autres, qu’il incarne. Le choix d’un préfacier est donc l’une des formes de reconnaissance, en tant qu’autorité qui est, non seulement en position de valider le texte, mais aussi de l’accompagner dans le temps. « Solliciter une préface est à la fois un acte d’allégeance, d’élection et d’habilitation », écrit Boukiba (1991, p. 79).

À un autre niveau, l’une des caractéristiques de la littérature pour enfants, c’est sa double destination. Le préfacier, qu’il soit auctorial ou allographe, se trouve devant l’obligation de s’adresser aux parents, aux éducateurs et aux enfants. Il est appelé à articuler son discours en fonction de ces publics. Le rôle de préfacier est donc double ; il doit convaincre et les adultes (parents ou pas)
et les enfants. Dans le premier paragraphe de sa préface autographe, Pierre Gripari prend le soin d’écrire ceci :
« Les enfants comprennent tout, cela est bien connu. S’il n’y avait qu’eux pour lire ce livre, l’idée ne me viendrait même pas d’y écrire une préface. Mais je soupçonne, hélas, que ces contes seront lus également par des grandes personnes. En conséquence, je crois devoir donner quelques explications » (1978, p. 1). Tout en souhaitant bonne lecture aux enfants, l’auteur-préfacier termine sa préface en déclarant : « Mais je m'arrête ici, car ce serait tout de même un peu fort si, dans un livre pour enfants, la préface destinée aux adultes devait prendre à elle seule plus de place qu'un conte de moyenne longueur ! » (1978, p. 1). C’est dire toute la complexité de la tâche du préfacier des textes pour enfants. Cette complexité provient grandement du rôle de médiation entre l’auteur/texte
et son public assuré et assumé par le préfacier qui affirme à la fois la valeur littéraire du texte préfacé et l’opportunité d’adopter ce dernier.

Préface et réception des livres pour enfants

Dans la littérature écrite pour les enfants en tamazight, le destinataire est clairement indiqué dès la couverture du livre
et réitéré dans le texte introductif et dans les préfaces. Hamid Bilek, Ferhat Chelmouni, Akli Kebaili (Azwawi) sont, entre autres, parmi les auteurs (préfaciers) mentionnant ce fait. Hamid Bilek, par exemple, exhorte les parents à raconter des histoires à leurs enfants, car, écrit-il dans le propos qui sert de préface à tous les contes qu’il a traduits, ces dernières sont à prendre comme des outils d’accompagnement psychologique préventif ; elles permettent de mieux penser l’avenir. De son côté, tout en invitant les parents à familiariser les enfants avec la lecture, Chelmouni (2015, p. 5) dédie sa préface à l’adulte qui va extérioriser ses ambitions et ses problèmes à travers le texte, et à l’enfant qui va se distraire et se former en lisant ce livre. Il écrit à propos des contes :

« Mazal-itent nefɛent, ar ass-ayi, i yal yiwen : I umeqqranen : wey yexsen ad yessenɛet tamsalt-is neɣ taluf-is neɣ ɛad lḥif-is fiḥel ma ɛelmen medden d acu taluft neɣ d anwa […] dayi d tamacahut y dey iteg izen-is d tamsirt. I imejtaḥ : ticki tewweḍ-d tmeddit, at zik ur sɛin akra s ay a ssedhun, imeqqranen, tarwa-nsen my llan ttrajun ard yenw imensi […] sasayen-asen-d iḍes, zuzunen-ten, yes-sent.

Ils [les contes] sont toujours d’un grand intérêt, pour chacun. Pour l’adulte : il va exprimer ses douleurs, ses chagrins et son malheur tout en gardant l’anonymat […] ici c’est le conte qui devient son message et une leçon pour les autres. Pour les enfants : pour se divertir et passer le temps avant de dormir. » 

En somme, l’émergence de la pratique du « conte écrit pour
enfant » semble nécessiter un accompagnement pour son installation et sa promotion. La préface parait jouer ce rôle par
le discours qu’elle contient et par l’autorité des agents qui le signent. Formellement, elle fait partie de l’ensemble diversifié de pratiques discursives qui ambitionne, en tant que « zone de transaction » et de médiation, à exercer une influence sur le récepteur du texte qu’elle présente tout en le lui proposant, voire en lui imposant des éléments qui l’accompagnent dans sa lecture.

La pratique de la préface dans la littérature, écrite en tamazight à destination des enfants, présente des données, collectées à partir de vingt-quatre livres, qui permettent, outre le(s) profil(s) des préfaciers, d’observer la morphologie, les langues et les types de la préface. Le tableau suivant propose les informations bibliométriques des livres possédant une préface. De ces informations et de l’observation des pratiques de la préface dans ces livres, on peut construire l’essentiel des caractéristiques de la préface dans le conte écrit pour les enfants :

Comme texte liminaire, la notion de préface est désignée par plusieurs termes en tamazight. Le plus utilisé est le mot Tazwart ; il est proposé pour la première fois pour rendre indistinctement l’introduction et la préface. Plus récemment, cette dernière est parfois orthographiée Tazwert pour la distinguer de l’introduction. Dérivé de la racine ZWR, le terme prend le sens d’un discours placé avant le texte principal. Il est utilisé par les préfaciers comme Kamal Nait Zerrad, Hamid Bilek et Tassadit Yahiaoui et Ldjouher Ben Mouhoub. Send awal est le deuxième terme employé pour désigner le discours préfaciel. En fait, il s’agit là de la traduction, par calque, du paratexte « avant-propos ». Ferhat Chelmouni
( (2015l’a utilisé dans son livre intitulé Timucuha « Contes ».

Le troisième terme désignant la notion de préface est utilisé par Zoulikha Touati (2012), dans ses livres Inuda ɣef zher-isyufa-t
« Il a cherché son sort, il l’a trouvé » et Yelli-s n yiɛiqer « La fille du stérile ». C’est le terme tasarut. Signifiant ordinairement
« clé », il suggère à la fois l’outil qui ouvre, comme un discours introductif, et un moyen qui aide à déchiffrer ce qui est opaque.

Avec la forme du livre et la fonction des textes qui y sont insérés, ces discours préfaciels constituent un critère de démarcation entre les recueils de contes destinés à la recherche, la valorisation et la découverte culturelle et le livre, d’un ou de plusieurs contes, destiné à l’enfant. Le contenu des préfaces porte la mention de cette destination. Au plan historique, il semble que la préface marque clairement la distinction entre ces deux types de livres.

Au plan formel, des préfaces étudiées ici occupent généralement l’espace d’une page (17 sur 24). Six d’entre elles dépassent le cadre d’une page ; les préfaciers y ont inséré des explications sur la notation utilisée et le lexique, comme dans Timucuha de Chelmouni et At wacciwen de Akerma (2015). Celles des livres comme Lkuraj n tyaẓit « La brave poule »
(Kebaili, 1998) et Yelli-s n yiɛiqer « La fille du stérile » (Touati,2012 ), présentent, de manière vague, l'histoire tout en laissant planer le suspense. Une préface adopte la forme d’un poème, fournissant des indices sous forme de devinettes où chaque indice correspond à un événement dans le conte.

Les préfaces des collections, telles que Azrar n tmucuha ur ntettu «  Série de contes que l’on n’oublie pas », se distinguent par leurs illustrations soignées et leurs couleurs vives qui captivent l'attention. De même, certaines préfaces, à l’instar du livre de Brachemi (2019), sont présentées sur des pages colorées, offrant un contraste visuel intéressant par rapport au texte principal. D'autres auteurs ont choisi d'adopter une police d'écriture différente entre la préface et le corps du texte.

Sur le plan linguistique, les préfaces ont été rédigées au départ en langue française, en raison fort probablement du lieu de l’édition des livres. Ce monolinguisme cède la place au bilinguisme français/kabyle (Allahoum, ,1995 Nait Zerrad,1998, Chemini, 2008). Puis, à partir de 2010, cette pratique a évolué vers une écriture exclusivement en tamazight. Depuis lors, les préfaciers semblent s'engager de plus en plus dans la rédaction en tamazight, soulignant ainsi l'importance de la lecture pour leur développement, notamment en tamazight. Par ailleurs, les préfaciers optent pour un style simple, des phrases claires pour permettre aux lecteurs de s'identifier et de bien comprendre le contenu. Certains d’entre eux profitent pour y insérer quelques termes nouveaux, tel que amezgun « théâtre », amezruy  « histoire », allal n trebga, « moyen d’éducation »,
tawnafit « curiosité » ,etc.

En outre, l’ensemble des préfaces recensées ici semble se scinder en deux catégories. Écrite par l’auteur principal du livre, la première est auctoriale. La seconde est allographe car elle est écrite par une personne autre que l’auteur du livre. Statistiquement en relation d’équivalence, ces préfaces semblent évoluer de la même manière. Si le qualifiant « allographe » est plus facile à identifier pour la préface, du fait que l’auteur de cette dernière est autre que le propriétaire intellectuel du livre, il n’est pas le même cas pour celui d’auctoriale. En effet, est-il vraiment correct de considérer les contes collectés comme une propriété du collecteur ? Le formatage graphique, qui consiste à attribuer une identité scripturaire au texte du conte en le segmentant en paragraphe, en organisant les zones de la narration et les zones du dialogue, en traduisant l’essentiel de la performance orale (caractéristique de son identité poétique), tout en l’accompagnant par des illustrations iconographiques, est-il suffisant pour accréditer celui qui le réalise comme propriétaire du texte ?

À l’exception des contes d’Akli Kebaili (Azwawi)) dont les fictions sont l’œuvre de leur auteur, les autres livres présentent des textes plus au moins remaniés (Chelmouni, par exemple) ; certains sont mis en contexte d’énonciation actualisé en adoptant la conteuse-énonciatrice comme personnage du texte (Tassadit Yahiaoui, 2014)) ; certains encore sont recomposés d’une manière présentant une originalité comme ceux de Shamy Chemini
(2008 ; 2009). En somme, ces textes tendent plus à ce qu’ils soient considérés comme une sorte d’appropriation personnelle de contes oraux. Auquel cas, la qualification du texte présentatif, faisant office de préface, n’est auctorial que d’une manière partielle. Considérer donc la préface écrite par la personne qui met en forme scripturaire, remanie ou recompose le conte oral (Shamy Chemini, Tassadit Yahiaoui, Ferhat Chelmouni et Zoulikha Touati, par exemple), comme une instance mitigée entre l’auctorialité
et l’allographie, parait recevable. À ce titre, l’étude des profils des deux types de préfaciers, auctorial et allographe, peut se faire dans un même mouvement.

Profils des préfaciers du livre pour enfants

Pour illustrer ces profils, observons les données construites à partir d’éléments biographiques et bibliométriques des auteurs suivants : Hamid Bilek(2009) , Shamy Chemini (2008),
Malek Houd (2013), Hmed Nekkar(2016) , Kamal Nait Zerrad (1998 ; 2002 ; 2009 ; 2016) Zoulikha Touati (2012 ; 2013)
et Tassadit Yahiaoui (2014).

Archéologue de formation, Hamid Bilek a d’abord été attaché de recherche dans l’Agence Nationale d’Archéologie (dans la circonscription archéologique de Tipaza, puis dans la circonscription archéologique de Béjaia, bureau de Tizi-Ouzou). Nommé sous-directeur au Haut-Commissariat à l’Amazighité, il s’occupait des affaires culturelles et du patrimoine, service dédié à l’accompagnement des associations et des activités promotionnelles du patrimoine matériel et immatériel. Il est également producteur par la traduction de livres pour enfants (une quinzaine de livres), traducteur de romans, de récits et de théâtre
et conseiller auprès d’un éditeur (Atfalouna et Imtitad,) pour les publications en tamazight et en français.

Shamy Chemini est musicien chanteur, l’un des fondateurs du groupe de musique Rock Les Abranis, il est auteur de romans en français, dont une saga La Kabylie orgueilleuse, de contes bilingues (français/kabyle) et il est aussi producteur de documentaires.

Elément actif du groupe de Tazmalt, ayant monté la revue Rivage durant les années 1980 (en collaboration avec Brahim Tazaghart, il s’occupait de la partie tamazight intitulée Asqif n ttmana), Malek Houd était, après des études et une période de travail dans l’industrie, enseignant de la langue amazighe. Il est poète, nouvelliste, romancier et traducteur. Il est aussi auteur d’un livre de contes et de récits traditionnels.

Enseignant des activités artistiques, puis de la langue amazighe, Ahmed Nekkar est auteur de plusieurs romans en tamazight, traducteur de plusieurs livres (romans, nouvelles, contes) et auteur de manuel d’apprentissage de la langue. Il est aussi connu comme éditeur.

Kamal Nait Zerrad est un chercheur berbérisant reconnu
et professeur des Universités. Il a exercé en Allemagne, à l’Université de Cologne, puis à l’Institut des Etudes Africaines de l’université de Francfort, et en France, à l’Institut National des Langues et Cultures Orientales, où il a occupé les fonctions de directeur de l’unité de recherche Langues et Cultures du Nord de l’Afrique et de la Diaspora (LACNAD). Il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur la linguistique amazighe dont des dictionnaires et une grammaire.

Zoulikha Touati est poétesse en arabe et en tamazight. Elle a publié de la poésie, des contes pour enfants et un roman. Elle a aussi occupé la fonction de présidente d’une association culturelle.

Tassadit Yahiaoui est enseignante de littérature amazighe à l’Université de Tizi-Ouzou ; elle a soutenu un magistère sur l’imaginaire des animaux dans la poésie kabyle. Actuellement elle prépare une thèse de doctorat dans la même Université.

De ces éléments biobibliographiques, on peut affirmer que ces préfaciers sont quasi globalement en relation directe avec la culture et la langue amazighes du fait qu’ils activent, d’une manière ou d’une autre dans ce domaine. En plus de leurs activités professionnelles, ils y sont également par l’esprit du militantisme linguistique et culturel. Certains parmi ces préfaciers sont d’une notoriété établie (Chemini, Nait Zerrad, Bilek, entre autres) ; ils participent, chacun à sa manière, à la vie culturelle.

Les préfaciers exploitent ce petit espace qui leur est imparti pour intégrer leurs discours dans leurs domaines de compétence. Par ailleurs, le contenu de l’œuvre préfacé est utilisé pour illustrer leurs propre discours. Ainsi, l’espace réservé à l’œuvre préfacée est généralement laissé à la fin du texte. Les préfaciers de la littérature pour enfants s’adressent dans leurs préfaces à plusieurs récepteurs ; chercheurs, enseignants, parents et enfants, ils insistent sur les rôles éducatif et ludique des textes adressés aux enfants.

La préface écrite en tamazight (kabyle) possède des caractéristiques qui la singularise, elle aborde rarement le contenu de texte mais elle le situe dans un contexte historique, identitaire
et linguistique pour pousser le lecteur potentiel à lire dans sa langue de sorte à protéger cette pratique.

Les auteurs et/ou les éditeurs font appel aux universitaires pour légitimer les textes et les rendre séduisants. De ce fait, les préfaciers présentent des profils qui font d’eux des personnes reconnaissables sur le plan socioculturel avec une notoriété dans leurs domaines respectifs. Ce qui place en eux une autorité (universitaire, littéraire, artistique et/ou militante), leur permettant d’accompagner l’émergence et l’installation du conte écrit en tamazight pour les enfants, à la fois comme genre littéraire
et comme activité culturelle. En apposant leur signature, ils apportent caution et crédibilité aux textes qu’ils préfacent.

Notes de bas de page

(1) Université Mouloud Mammeri, Faculté des lettres et des langues, 15000,
Tizi Ouzou, Algérie.

Centre de Recherche en Langue et Culture Amazighe de Bejaia, Algérie.

Même si nous avons adopté le terme générique tamazight, il est à signaler que les données du corpus exploitées dans l’analyse sont issues exclusivement de la variété kabyle.

Bibliographie

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(2) Université Mouloud Mammeri, Faculté des lettres et des langues, 15000,
Tizi Ouzou, Algérie.

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TIKOBAINI, O. & HADIBI, M. A. (2025). Préfaces et préfaciers du livre pour enfants en tamazight. Formes et médiation. Insaniyat - Algerian Journal of Anthropology and Social Sciences, 29(107), 19–30. https://www.insaniyat.crasc.dz/en/article/prefaces-et-prefaciers-du-livre-pour-enfants-en-tamazight-formes-et-mediation